samedi 6 janvier 2024

La difficile fiabilisation des données cartographiques. Épisode 1 : quand il a fallu batailler pour pouvoir enfin tracer une nouvelle route

Quand on veut chercher un lieu sur un site de cartographie, il faut s’assurer de son emplacement correct, avec le maximum d’informations nécessaires telles que l’adresse, le numéro de téléphone ou bien les horaires d’ouverture. Quand on veut calculer un itinéraire, c’est le plus rapide ou le plus court que l’on souhaite choisir. Mais il arrive souvent que les données soient incorrectes ; c’est aux utilisateurs de tenter de corriger la carte, sous réserve que les images satellites dont sont souvent basés l’emplacement des routes et des lieux soit suffisamment à jour.

Début de rédaction le 6 janvier 2024.

Premier épisode : les sites de cartographie grand public (Google Maps sans oublier ses concurrents)

L’un des plus grands sites de cartographie s’appelle Google Maps. Lancé en 2005 aux États-Unis et en 2006 en France, il est complété en 2007 par un service de visualisation panoramique des rues appelé Google Street View, arrivé en France au milieu de l’année 2008, en suivant le tracé du Tour de France (dont une partie de l’agglomération de Vichy a pu profiter)[a]. Les données cartographiques étaient principalement fournies, en France, par le fournisseur TeleAtlas ; il n’était alors pas possible de soumettre directement un problème de carte[b]. Depuis juin 2011, les données cartographiques sont sous droit d’auteur de Google, et ne dépendent donc plus d’un prestataire extérieur.

L’imagerie satellite (encore faut-il qu’elle soit récente), une des possibilités pour cartographier de nouvelles routes pour Maps (avec Street View)

Jusqu’en 2013, une imagerie de faible qualité

L’imagerie satellite, sur Google Maps, provenait essentiellement de fournisseurs tels que DigitalGlobe, où lorsque j’ai commencé à utiliser ce service, la qualité de l’image avait une précision moindre (pour connaître les dates, il faut passer par Google Earth : elle datait de mars 2003). Ensuite, on a eu droit aux images fournies par l’IGN[c], datées de 2008. À cette époque, à Vichy, le quartier de la gare était en pleine restructuration, même si les deux giratoires de la place de la Gare étaient déjà présents.

6 janvier 2014 : une nouvelle image, plus précise, montre enfin les changements réalisés cinq ans plus tôt

Ce 6 janvier 2014 (soit dix ans jour pour jour avant la rédaction de cet article), une nouvelle imagerie satellite, plus précise que dans le reste du département, est disponible. Datée du 15 août 2013, elle permet (enfin) d’explorer les nouveautés des cinq dernières années :

Année Principales modifications
2008 Vichy : poursuite des travaux de l’esplanade du lac d’Allier et de la place de la Gare
2009 Vichy : fin des travaux de l’esplanade du lac d’Allier (mai) et du quartier de la Gare (juin) | Cusset : travaux autour de la cité scolaire Albert-Londres (phase 1 : halte routière) | Bellerive-sur-Allier : plan de circulation autour du collège Jean-Rostand et du COSEC (été) et aménagements de sécurité (fin d’année) | Abrest : début de la phase 2 du réaménagement de bourg
2010 Vichy : réaménagement de la rue de Paris (en partie) | Cusset : fin des travaux des alentours de la cité scolaire Albert-Londres | Bellerive-sur-Allier : réaménagement autour de la mairie | Abrest : fin de la phase 2 du réaménagement de bourg
2011 Vichy : fin du réaménagement de la rue de Paris
2012 Vichy : réaménagement du boulevard de la Résistance | Cusset : réaménagement du cours Tracy et début des travaux du boulevard urbain
2013 Vichy : début du réaménagement des berges d’Allier | Cusset : suite et fin des travaux du boulevard urbain, réaménagement du cours Arloing (fin en 2014)

À l’époque, un service additionnel à Google Maps, Google Map Maker, permettait de modifier la carte sous réserve que les modifications soient approuvées après discussion avec les modérateurs de confiance.

Une expérience délicate

Nouveau boulevard urbain : ça passe ou ça casse

Pour tracer la nouvelle route, qui se situe pour partie entre deux chemins existants (l’un à mettre en impasse et l’autre à transformer en chemin interdit à la circulation de tout véhicule), cela n’a pas été facile.

Précisons qu’il est désormais impossible de reconstituer les conversations, seules les réponses sont encore disponibles dans les courriers reçus.

Pour créer le premier tronçon du boulevard urbain, entre l’avenue de Vichy (D 2209) et le boulevard Denière, il a fallu :

  • modifier le tracé de la départementale (effectif depuis novembre 2012, mais qui a eu beaucoup de mal à être concrétisé) ;
  • supprimer les segments du carrefour giratoire entre la rue de Vendée (côté Vichy), la rue de Bourgogne (côté Vichy) et le boulevard du 8-Mai-1945 (côté Cusset) ;
  • transformer l’ancienne impasse Brivet (située dans le prolongement de la rue de Bordeaux) en la nouvelle rue de Bordeaux prolongée ;
  • créer les nouvelles voies en direction du centre hospitalier.

Au fur et à mesure des modifications effectuées et validées ou discutées par les « modérateurs de confiance », la nouvelle route apparaît progressivement sur la carte Google Maps. Comme je l’ai répété plusieurs fois dans cet article, il y a toujours une épine dans le projet de voir cette nouvelle route sur une carte, d’autant plus que je travaille en parallèle pour OpenStreetMap où ça passe sans problème… et sans GPS (plus de détails dans des articles qui seront publiés ultérieurement).

La menace d’une suppression de la nouvelle route planait… car pour créer une nouvelle route, il fallait des sources autorisées. Le site d’une collectivité, une source bien informée parmi d’autres, aurait bien pu servir pour un tracé exact, mais risque de ne pas passer, avec pour conséquence la non-reconnaissance d’une nouvelle route, jusqu’à ce 6 janvier 2014, où l’on a vu les délimitations de la nouvelle route.

Map Maker a également été utilisé pour fiabiliser (enfin) des modifications de tracé remontant parfois à la fin des années 2000, comme le collège Jean-Rostand à Bellerive-sur-Allier, qui a connu une profonde modification (tout comme la rue Jean-Ferlot) à l’été 2009 : ralentisseurs coussin lyonnais à foison, parkings…

Le service Google Map Maker a été suspendu en 2015 à la suite d’un vandalisme important, avant de fermer définitivement le 31 mars 2017 ; la modification de la carte est devenue de plus en plus difficile. Les fonctions de mise à jour de la carte ont depuis été intégrées à Google Maps.

Et chez les concurrents

Les concurrents ont peu suivi, d’autant plus que je me ne suis pas impliqué dans la mise à jour des données cartographiques des sites concurrents (Mappy, Michelin, Bing). Et je ne parlerai pas de Waze, qui permet d’éditer plus facilement la carte à condition d’avoir roulé dans une zone spécifique et d’avoir des droits d’édition suffisants. Pour cela, d’autres éditeurs ont pu parvenir à créer la nouvelle route (et dont je suis impliqué quotidiennement dans l’édition de la carte de ce GPS).

Dix ans plus tard, le boulevard urbain est complet, mais avec quelques défauts. Et il est possible que Google se soit inspiré des données de la carte de Waze, plus facile à modifier que la carte de Maps.

Et dans les autres zones ?

Dans la zone de Vichy, deux nouvelles mises à jour

La mise à jour de l’imagerie satellite de 2014 a permis de mettre enfin au jour les aménagements réalisés jusqu’au milieu de l’année 2013. À noter que j’avais, à l’époque, réalisé des cartes (sur Google Maps) montrant les changements dans l’agglomération de Vichy, avec un code couleur en fonction de la présence (vert si entièrement disponible, rouge si postérieur à l’image satellite). Une nouvelle mise à jour de l’image satellite survient en juin 2017, avec des photos du 8 avril 2017 (où l’on peut observer le tracé de l’autoroute A 719 prolongée, le contournement sud-ouest et la deuxième phase du boulevard urbain), puis quatre ans plus tard, en 2021, avec des photos de juillet 2020.

Côté fiabilité, on peut encore constater des erreurs flagrantes de placement de lieux. Aujourd’hui, l’hypermarché Carrefour de Cusset était placé… sur la rue même des Peupliers, à 200 mètres de là où il devait être. Ou encore le Buffalo Grill de Bellerive-sur-Allier, placé 400 mètres plus loin sur la route, malgré des modifications tout à fait légitimes mais qui semblent ignorées.

Montluçon, Moulins et Clermont-Ferrand… et ailleurs

Les deux autres principales agglomérations de l’Allier, Moulins et Montluçon, n’ont pas eu droit à cette nouveauté si tôt. Elles ont dû attendre… fin 2018 pour avoir des images à jour, en remplacement de celles de 2008. Quant à Clermont-Ferrand, elle a eu très tôt des images haute résolution, datées de septembre 2006, juste avant la mise en service du tramway. Le comble, aujourd’hui (et c’est toujours le cas), le prolongement du tramway aux Vergnes, effectif depuis le 14 décembre 2013, n’est toujours pas tracé sur Google Maps !

Dans un prochain épisode : la mise à jour de la carte sur OpenStreetMap


  1. J’en avais fait l’expérience en 2009 avec une route déclassée, qui a mis un an pour que la modification soit effective).
  2. Une partie de Cusset, de Vichy (dont la rue de Paris, rénovée depuis), le nord de Bellerive-sur-Allier, Charmeil et Saint-Rémy-en-Rollat.
  3. Institut géographique national, qui fournissait sur l’ensemble de la France (hors zones denses) des images aériennes dans toutes les zones de France y compris rurales.

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